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La Cour de cassation a rendu une décision historique en matière d’enlèvement international d’enfant, permettant le retour de l’enfant dans un État autre que celui de sa résidence habituelle. Cette décision, prise le 10 juillet 2024, marque une avancée significative dans l’interprétation de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980.
Une nouvelle interprétation de la Convention de La Haye
La Convention de La Haye de 1980 prévoit le retour immédiat de l’enfant en cas de déplacement illicite, sans préciser vers quel État. Traditionnellement, ce retour s’effectue vers l’État de la résidence habituelle de l’enfant avant son déplacement. Cependant, la Cour de cassation a admis, pour la première fois, qu’il peut s’agir, à titre exceptionnel, d’un autre État. Cette interprétation offre une plus grande souplesse aux juges pour statuer dans l’intérêt supérieur de l’enfant.
Un cas concret : l’affaire ukraino-danoise
Prenons l’exemple d’une affaire récente impliquant une femme ukrainienne et un homme danois. Mariés en 2017 et installés au Danemark, ils ont eu un enfant en Ukraine en 2018. Après leur divorce en 2020, la mère s’est installée en France avec l’enfant sans en informer le père. En 2023, le père a demandé le retour de l’enfant au Danemark, mais la Cour d’appel d’Aix-en-Provence a rejeté sa demande, constatant que l’enfant n’avait jamais vu son père et était bien intégré en France. La Cour de cassation a confirmé cette décision, soulignant que le retour de l’enfant dans un autre État pouvait être ordonné si cela permettait de préserver son environnement familier et son développement.
Les critères d’exceptionnalité
La Cour de cassation a précisé les circonstances dans lesquelles un retour vers un autre État peut être ordonné. Ce retour ne peut être envisagé que s’il permet de replacer l’enfant dans un environnement familier, assurant ainsi une continuité dans ses conditions de vie et de développement. Dans l’affaire mentionnée, la Cour a estimé que l’enfant, ne connaissant ni son père ni le Danemark, était mieux placé en France avec sa mère, qui lui offrait les conditions nécessaires à son épanouissement.
Cette décision de la Cour de cassation ouvre la voie à une interprétation plus flexible de la Convention de La Haye, permettant de mieux prendre en compte l’intérêt supérieur de l’enfant.
Source : Cass. 1re civ., 10 juill. 2024, n° 24-12.156, B+L